Amour et autres gros mots dans un certain milieu alterno
Lu sur Gendertrouble.org : "Texte écrit d’une traite lors d’un moment douloureux. À lire avec le recul nécessaire, à prendre comme une dissection mi-lucide mi-passionnée d’un bout de mon ventre après les moments passés. Plutôt que de le retoucher, j’ai préféré en annoter quelques passages ambiguës avant de le diffuser.
Comme beaucoup en ont fait l’expérience, il est tristement habituel de constater une absence totale de visibilité pour les sentiments amoureux, l’intimité exclusive, les relations particulières et l’intensité affective au sein de divers squats libertaires [1].
On y vénère inconsciemment le collectif, on y sacrifie son individualité en adoptant les normes du ghetto, plus ou moins marquées selon que l’esthétique y est punk, intello, néo-rurale, arty-farty ou mécano. On recherche un palliatif à ses insécurités propres dans le groupe, et commence alors un processus d’intégration qui passe souvent par la négation de ses propres émotions, par le rejet des autres, les "normaux", qui soudain nous atterrent, et nous semblent d’autant plus extra-terrestres et méprisables qu’ils nous ressemblent trop, qu’ils se font le miroir de plein de nos défauts, de nos déterminations sociales, et que plutôt que d’assumer cette communauté de constitution et parfois d’intérêts, il est plus facile, plus grisant, de construire des barrières et de jouir du privilège d’être du côté des "bons".
Être dans le groupe revient dès lors à y passer l’essentiel de son temps, à se désengager progressivement de ses relations "extérieures", trop ringardes et devenues gênantes, théâtre d’une tension qui émerge inévitablement à force que ces gens "moins marginaux" sont passés au crible de l’intégrité rebelle. On identifie ses intérêts à ceux du groupe, on rentre dans l’attente de son acquiescement, et on s’y réfugie encore plus quand il subit les attaques, illégitimes comme pertinentes, du "monde extérieur". Les autres deviennent "craignos", et leur adresser la parole, c’est les cautionner, c’est aussi prêter le flanc à la destruction de l’idéal du groupe, qui doit être parfait pour bien fonctionner.
Le rapport à l’amour dans tout ça? L’amour, c’est un de ces trucs qui parfois parvient à arracher, momentanément ou de manière prolongée, dans des degrés divers d’intensité, au groupe. Ça implique souvent de passer moins de temps dans le groupe, de redevenir, souvent, un individu vis à vis de ce dernier, une personne qui a ses propres priorités. Le groupe n’aime pas. En tant qu’amoureux, on devient vite gêné. On a l’impression qu’il faut choisir entre le groupe et le couple, que lorsqu’on revient dans le groupe après une pause amoureuse, on a raté plein de choses. On culpabilise d’avoir moins de disponibilités, on ne parle pas de son amour parce que c’est une intensité qui n’est pas partagée - tout le monde n’a pas d’amoureux-se. On en parle pas par peur d’être associé, de ne plus être un "je" mais un "je + il-le". Bizarrement, le "on" du collectif suscite beaucoup moins d’émotions. On a peur d’être insidieusement évincé-e du collectif vis à vis duquel on est moins fidèle. Quand la relation amoureuse se situe en dehors des cercles autorisés, c’est encore pire, parce que la relativisation qu’elle amène (l’ouverture d’esprit, aussi), le recul vis à vis du groupe ont souvent du mal à être acceptés par la communauté [2].
Comme la communauté est en "rupture", fondée sur la radicalité et la lutte contre la normalité, on justifie aussi "politiquement" le rejet des relations intenses et exclusives. On y projette tout l’enfermement du monde (pour ne pas voir celui dans lequel on est?), on en fait un objet dégoûtant, indésirable, pour mieux se cacher, aussi, ce qu’on aimerait (c’est plus pratique que d’assumer la réalité de la misère affective dans le milieu, et de se demander ce qui la génère). L’hétérosexualité est clouée au pilori. Pas parce qu’on ne la pratique pas, mais parce que Bang Bang est à la mode, que les flics, il faut que ce soit les autres, et qu’on serait bien emmerdés de se voir taxé-e-s d’hétéroflics à l’occase. On réintroduit un peu la sexualité, mais sous l’angle exclusif de la subversion (en mots), du "queer", de la négation de nos désirs actuels, d’un plaisir compliqué et inaccessible [3]. On culpabilise ses ressentis jugés "conventionnels", on ne les montre pas, on les fait en cachette, à la sauvette, et on s’empresse de revenir prendre une louche de collectif ensuite pour se laver de la culpabilité.
Tout ce que j’ai écrit est (in)volontaire excessif, brutal, en décalage avec la réalité, la beauté des collectifs, leur capacité à propulser les individu-e-s au delà des limites étriquées de la société, de se redécouvrir animal social, de comploter de manière jouissive pour démolir la société, de se sentir porté par une énergie vitale, tripale, de s’inscrire dans l’histoire des révolté-e-s, d’être entouré-e de gens adorables, pertinents, beaux et intelligents. Tout ça, je le sais. Je l’ai vécu, je l’ai animé, porté, je m’y suis donné tout entier. J’y ai cru, j’y crois encore à divers degrés. Et j’ai consacré des milliers de lignes de tracts, de communiqués, de blogs, de journaux intimes et de courrier à le louer.
Mais ce que j’ai aujourd’hui au fond des tripes, et que je n’arrive que difficilement à exprimer, c’est combien ce collectif, ce mouvement, cette communauté, contre tous ses avantages, a aussi pu me labourer, broyer mes plaisirs et mes désirs, m’arracher, lentement mais sûrement, aux relations les plus belles que j’ai jamais pu créer, aux intensités les plus précieuses. Indirectement, insidieusement. Avec le sourire, sans jamais le réaliser un instant. Car il n’y a point de machiavélisme derrière tout ça. Aucune de ces personnes, ni moi, car j’ai participé de tout ça autant que bien d’autres, assurément, n’est "méchante" et ne souhaite faire mal, ni s’inscrire ouvertement contre les sentiments.
Mais ce que je sais, pour moi, pour d’autres, c’est que si ces dynamiques collectives m’ont transformé, si je leur doit beaucoup de ce que je suis maintenant, je dois également tant, et peut-être même surtout, aux relations profondes, amoureuses, délicieuses. À ces relations dans lesquelles j’ai donné et reçu toute l’attention qu’une personne peut porter à une autre, dans lesquelles j’ai ressenti une confiance rare, dans lesquelles j’ai trouvé l’énergie de dépasser les schémas parmi les plus encrassés. Rarement autant qu’en faisant l’amour, en partageant mon enfance, en embrassant tendrement, en cuisinant un petit plat pour deux, en échangeant des lectures et en créant ensemble, je n’ai eu le sentiment aussi net de me révolutionner. Les moments d’intense complicité que j’ai ainsi partagés sont parmi les plus belles émeutes, les meilleures actions d’occupation d’espaces nous étant interdits, les plus chouettes moments de vie. Autant de réalités partagées que mon milieu persiste pourtant à ignorer, à fouler aux pieds, à court-circuiter.
Alors aujourd’hui, je ne sais pas, ma tête est en bouillie, prise entre une rage sourde envers un collectif d’autant plus ingrat que je l’ai animé, lui ai tout donné, entre le désir de continuer à le transformer, la nécessité de reconquérir un terrain intérieur qui ne pourra être approprié, le dégoût que m’inspire la société et ses formes institutionnalisées de relations, d’amours, d’associations.
Reste à convertir la colère, le goût amer, la déception et les émotions en outils de construction, en passion positives contribuant à révolutionner la révolution, sans quoi je crains qu’elle continue, d’année en année, à être désertée par tous ces gens qui, une fois passé le moment grisant d’un collectif ascendant, se trouvent bien démunis personnellement et ressentent la carence d’appuis solides, affectifs notamment, mais croient (malheureusement avec raison, actuellement) ne pas pouvoir y construire les relations auxquels ils aspirent souvent.
12th December 2004 by darkveggy
Post-scriptum
NDLR: le texte original date de février 2004.
Notes
[1] Si ce texte est issu d’une expérience essentiellement dijonnaise, ses principaux traits me semblent néanmoins applicables à bien d’autres lieux autogérés dans l’hexagone. Et si je me permet parfois de généraliser, c’est que ces ressentis font échos à d’autres histoires, et que j’ai souvent cru constater de semblables dynamiques dans des collectifs que j’ai traversés.
[2] Il me semble nécessaire de préciser que si les relations amoureuses peuvent faciliter un recul vis à vis de collectifs par trop fusionnels et enfermants - ce que je juge ici appréciable et salutaire -, il ne s’agit pas pour autant d’être aveugle quant aux semblables dangers que peuvent entraîner des relations affectives fortes (dont les méfaits sont d’ailleurs bien plus largement répandus). Le propos n’est pas de substituer une dépendance à une autre, et de se voiler la face quant au possible enfermement relationnel auquel nous nous risquons dans l’émotion, mais de pointer comment étrangement, il est des proximités encouragées quand d’autres sont plutôt tabouisées.
[3] Loin de moi l’idée de relativiser l’importance des cultures queer, de la remise en question de l’hétéronormalité, ou de critiquer "Bang-Bang", zine anarchopédé que je trouve plutôt brillant et inspirant. Non, ce que j’ai voulu pointer du doigt, c’est ce décalage récurrent entre les dires et la réalité au sujet de la sexualité: cette manière qu’ont les hétéro-e-s de cacher leurs pratiques derrière les icônes d’une sexualité déconstruite, et d’invisibiliser ces plaisirs partagés. Cette dévalorisation de l’hétérosexualité ne me semble guère honnête de la part des concerné-e-s, et ne facilite pas, je crois, le travail de déconstruction de nos désirs genrés. Plus souvent, j’y vois comme conséquence l’émergence de comportements empruntés, d’une révolution de surface, d’un faire-semblant qui se voile la face. J’aime le vernis et les paillettes, et jouer avec les identités, mais sans nier mes désirs actuels, quand bien même ils sont plutôt hétéros. J’aimerais les assumer plutôt que de les culpabiliser; reconnaître leurs potentialités et qualités plutôt que de les déprécier; élargir ma palette de possibilités plutôt que d’en enterrer la moitié
Comme beaucoup en ont fait l’expérience, il est tristement habituel de constater une absence totale de visibilité pour les sentiments amoureux, l’intimité exclusive, les relations particulières et l’intensité affective au sein de divers squats libertaires [1].
On y vénère inconsciemment le collectif, on y sacrifie son individualité en adoptant les normes du ghetto, plus ou moins marquées selon que l’esthétique y est punk, intello, néo-rurale, arty-farty ou mécano. On recherche un palliatif à ses insécurités propres dans le groupe, et commence alors un processus d’intégration qui passe souvent par la négation de ses propres émotions, par le rejet des autres, les "normaux", qui soudain nous atterrent, et nous semblent d’autant plus extra-terrestres et méprisables qu’ils nous ressemblent trop, qu’ils se font le miroir de plein de nos défauts, de nos déterminations sociales, et que plutôt que d’assumer cette communauté de constitution et parfois d’intérêts, il est plus facile, plus grisant, de construire des barrières et de jouir du privilège d’être du côté des "bons".
Être dans le groupe revient dès lors à y passer l’essentiel de son temps, à se désengager progressivement de ses relations "extérieures", trop ringardes et devenues gênantes, théâtre d’une tension qui émerge inévitablement à force que ces gens "moins marginaux" sont passés au crible de l’intégrité rebelle. On identifie ses intérêts à ceux du groupe, on rentre dans l’attente de son acquiescement, et on s’y réfugie encore plus quand il subit les attaques, illégitimes comme pertinentes, du "monde extérieur". Les autres deviennent "craignos", et leur adresser la parole, c’est les cautionner, c’est aussi prêter le flanc à la destruction de l’idéal du groupe, qui doit être parfait pour bien fonctionner.
Le rapport à l’amour dans tout ça? L’amour, c’est un de ces trucs qui parfois parvient à arracher, momentanément ou de manière prolongée, dans des degrés divers d’intensité, au groupe. Ça implique souvent de passer moins de temps dans le groupe, de redevenir, souvent, un individu vis à vis de ce dernier, une personne qui a ses propres priorités. Le groupe n’aime pas. En tant qu’amoureux, on devient vite gêné. On a l’impression qu’il faut choisir entre le groupe et le couple, que lorsqu’on revient dans le groupe après une pause amoureuse, on a raté plein de choses. On culpabilise d’avoir moins de disponibilités, on ne parle pas de son amour parce que c’est une intensité qui n’est pas partagée - tout le monde n’a pas d’amoureux-se. On en parle pas par peur d’être associé, de ne plus être un "je" mais un "je + il-le". Bizarrement, le "on" du collectif suscite beaucoup moins d’émotions. On a peur d’être insidieusement évincé-e du collectif vis à vis duquel on est moins fidèle. Quand la relation amoureuse se situe en dehors des cercles autorisés, c’est encore pire, parce que la relativisation qu’elle amène (l’ouverture d’esprit, aussi), le recul vis à vis du groupe ont souvent du mal à être acceptés par la communauté [2].
Comme la communauté est en "rupture", fondée sur la radicalité et la lutte contre la normalité, on justifie aussi "politiquement" le rejet des relations intenses et exclusives. On y projette tout l’enfermement du monde (pour ne pas voir celui dans lequel on est?), on en fait un objet dégoûtant, indésirable, pour mieux se cacher, aussi, ce qu’on aimerait (c’est plus pratique que d’assumer la réalité de la misère affective dans le milieu, et de se demander ce qui la génère). L’hétérosexualité est clouée au pilori. Pas parce qu’on ne la pratique pas, mais parce que Bang Bang est à la mode, que les flics, il faut que ce soit les autres, et qu’on serait bien emmerdés de se voir taxé-e-s d’hétéroflics à l’occase. On réintroduit un peu la sexualité, mais sous l’angle exclusif de la subversion (en mots), du "queer", de la négation de nos désirs actuels, d’un plaisir compliqué et inaccessible [3]. On culpabilise ses ressentis jugés "conventionnels", on ne les montre pas, on les fait en cachette, à la sauvette, et on s’empresse de revenir prendre une louche de collectif ensuite pour se laver de la culpabilité.
Tout ce que j’ai écrit est (in)volontaire excessif, brutal, en décalage avec la réalité, la beauté des collectifs, leur capacité à propulser les individu-e-s au delà des limites étriquées de la société, de se redécouvrir animal social, de comploter de manière jouissive pour démolir la société, de se sentir porté par une énergie vitale, tripale, de s’inscrire dans l’histoire des révolté-e-s, d’être entouré-e de gens adorables, pertinents, beaux et intelligents. Tout ça, je le sais. Je l’ai vécu, je l’ai animé, porté, je m’y suis donné tout entier. J’y ai cru, j’y crois encore à divers degrés. Et j’ai consacré des milliers de lignes de tracts, de communiqués, de blogs, de journaux intimes et de courrier à le louer.
Mais ce que j’ai aujourd’hui au fond des tripes, et que je n’arrive que difficilement à exprimer, c’est combien ce collectif, ce mouvement, cette communauté, contre tous ses avantages, a aussi pu me labourer, broyer mes plaisirs et mes désirs, m’arracher, lentement mais sûrement, aux relations les plus belles que j’ai jamais pu créer, aux intensités les plus précieuses. Indirectement, insidieusement. Avec le sourire, sans jamais le réaliser un instant. Car il n’y a point de machiavélisme derrière tout ça. Aucune de ces personnes, ni moi, car j’ai participé de tout ça autant que bien d’autres, assurément, n’est "méchante" et ne souhaite faire mal, ni s’inscrire ouvertement contre les sentiments.
Mais ce que je sais, pour moi, pour d’autres, c’est que si ces dynamiques collectives m’ont transformé, si je leur doit beaucoup de ce que je suis maintenant, je dois également tant, et peut-être même surtout, aux relations profondes, amoureuses, délicieuses. À ces relations dans lesquelles j’ai donné et reçu toute l’attention qu’une personne peut porter à une autre, dans lesquelles j’ai ressenti une confiance rare, dans lesquelles j’ai trouvé l’énergie de dépasser les schémas parmi les plus encrassés. Rarement autant qu’en faisant l’amour, en partageant mon enfance, en embrassant tendrement, en cuisinant un petit plat pour deux, en échangeant des lectures et en créant ensemble, je n’ai eu le sentiment aussi net de me révolutionner. Les moments d’intense complicité que j’ai ainsi partagés sont parmi les plus belles émeutes, les meilleures actions d’occupation d’espaces nous étant interdits, les plus chouettes moments de vie. Autant de réalités partagées que mon milieu persiste pourtant à ignorer, à fouler aux pieds, à court-circuiter.
Alors aujourd’hui, je ne sais pas, ma tête est en bouillie, prise entre une rage sourde envers un collectif d’autant plus ingrat que je l’ai animé, lui ai tout donné, entre le désir de continuer à le transformer, la nécessité de reconquérir un terrain intérieur qui ne pourra être approprié, le dégoût que m’inspire la société et ses formes institutionnalisées de relations, d’amours, d’associations.
Reste à convertir la colère, le goût amer, la déception et les émotions en outils de construction, en passion positives contribuant à révolutionner la révolution, sans quoi je crains qu’elle continue, d’année en année, à être désertée par tous ces gens qui, une fois passé le moment grisant d’un collectif ascendant, se trouvent bien démunis personnellement et ressentent la carence d’appuis solides, affectifs notamment, mais croient (malheureusement avec raison, actuellement) ne pas pouvoir y construire les relations auxquels ils aspirent souvent.
12th December 2004 by darkveggy
Post-scriptum
NDLR: le texte original date de février 2004.
Notes
[1] Si ce texte est issu d’une expérience essentiellement dijonnaise, ses principaux traits me semblent néanmoins applicables à bien d’autres lieux autogérés dans l’hexagone. Et si je me permet parfois de généraliser, c’est que ces ressentis font échos à d’autres histoires, et que j’ai souvent cru constater de semblables dynamiques dans des collectifs que j’ai traversés.
[2] Il me semble nécessaire de préciser que si les relations amoureuses peuvent faciliter un recul vis à vis de collectifs par trop fusionnels et enfermants - ce que je juge ici appréciable et salutaire -, il ne s’agit pas pour autant d’être aveugle quant aux semblables dangers que peuvent entraîner des relations affectives fortes (dont les méfaits sont d’ailleurs bien plus largement répandus). Le propos n’est pas de substituer une dépendance à une autre, et de se voiler la face quant au possible enfermement relationnel auquel nous nous risquons dans l’émotion, mais de pointer comment étrangement, il est des proximités encouragées quand d’autres sont plutôt tabouisées.
[3] Loin de moi l’idée de relativiser l’importance des cultures queer, de la remise en question de l’hétéronormalité, ou de critiquer "Bang-Bang", zine anarchopédé que je trouve plutôt brillant et inspirant. Non, ce que j’ai voulu pointer du doigt, c’est ce décalage récurrent entre les dires et la réalité au sujet de la sexualité: cette manière qu’ont les hétéro-e-s de cacher leurs pratiques derrière les icônes d’une sexualité déconstruite, et d’invisibiliser ces plaisirs partagés. Cette dévalorisation de l’hétérosexualité ne me semble guère honnête de la part des concerné-e-s, et ne facilite pas, je crois, le travail de déconstruction de nos désirs genrés. Plus souvent, j’y vois comme conséquence l’émergence de comportements empruntés, d’une révolution de surface, d’un faire-semblant qui se voile la face. J’aime le vernis et les paillettes, et jouer avec les identités, mais sans nier mes désirs actuels, quand bien même ils sont plutôt hétéros. J’aimerais les assumer plutôt que de les culpabiliser; reconnaître leurs potentialités et qualités plutôt que de les déprécier; élargir ma palette de possibilités plutôt que d’en enterrer la moitié
Ecrit par libertad, le Samedi 5 Février 2005, 17:59 dans la rubrique Le quotidien.